Une Allemande dans la moutarde
Auteur inconnu
Déchiffrage Lise Dubreucq
Mise en ligne 4 novembre 2020.
Trouvés dans un livre de cuisine, deux feuillets manuscrits datant probablement du début du XXe siècle nous ont interpelés. Belle écriture mais une langue française… assez étrange que notre amie Lise a eu la patience infinie de déchiffrer et retranscrire.
Un conseil : lisez le texte à haute voix avec un accent germanique ou lisez « j » quand on écrit « ch », « d » pour « t », « b » pour « p », « v » pour « f », « c » pour « g », etc.
Si vous connaissez cette « chanson », nous vous saurions gré de nous contacter afin de mieux la situer dans un contexte historique.
Serait une page d'humour d'un travailleur obligatoire de 1914-18 ?
Une Allemande dans la moutarde
I
Tous les chours tès le grand ma-tin après que je me suis fait pelle. J’oufrevite mon maca-sin pour recevoir la glientèle. Je connais peaucoup mon métier et sert très bien les acheteuses ; mais on sait tans tout le quartier que j’aime peu les mar [maris ?]
Refrain
Chè suis tant l’épice - ri - e. C’est une profession cholie, car c’est tant l’épicerie, qu’il faut afoir tu chénie, il faut afoir peaucoup te chénie tant l'épicerie, tant l’épicerie il faut afoir peaucoup te chénie tant l’épice - ri - e
Parlé
Ca c’est frai je suis très gonsiencieuse je fends aux plus chuste prix. Aussi je peux dire que je suis une épicière de première gatégorie !
Quand on pense que mon père, il ne foulait pas que j’emprassasse cette cholie profession. Il tissait touchours que l’épicerie était trop tifficile à cause de ses manibulations … comme qui tirait les tripotaches du métier. Enfin il foulait pas je m’en (mélasse) …
Mais comme ma mère foulait me faire une position, j’ai fendu tes allumèttres et du sucre tout de même et j’en suis bien contente.
Quel peau commerce ! On est touchour en choix te marchantisses et puis faut pas être pête, car pour faire plaisir aux chantands faut touchours un betit mot aimable a tire : « Melle Cartochen 15 centimet de vinaigre ! » « Du finaigre pour monsieur alors c’est tu finaigre à cornichon probablement : Hein, c’est-il chentil ? Tu reste nous somme tout-e gomme ça dans notre famille, nos plaisanteries ne manquent pas de sel, nous les savons très bien et nous les tissons à l’ogasion pour amuser l’acheteur et pendant qu’il rit glisse chentiment tes fieux rossignols. Ecoutez donc :
II
Mon père était très ampitieux et me laissa pour heri-tage un fonds tes plus avanta-cheux d’épicerie et de fromaghe ! tout est de pelle qualité et grâce a mes talents ja joute que j’ai la spécialité du moutarde et du bon chucrute charcuteuses. Refrain
Parlé
Oh : c’est ca qu’est fou les chucrute ! A propos de chucrute, croiriez fou qu’il y a dites maufaises langues qui prétendent que j’ai un bétit accent. Moi un accent … si on peut dire ? … Ainsi mamzelle Choséphine qu’est pourtant de ma fillage se moque toujours de moi. L’autre fois elle me dit en entrant : « Mamzelle Carotchen, je voudrais des ponnes poules de gomme pour le betit pichon de Madame qu’est enrhumé ». « C’est y tes poules qui folent, pour un betit pichon qui fole aussi que fous foulez tire ? ». « Non, c’est tes poules rontes comme tes pilles pour son pichon de pétit chein. Alors c’est pas un pichon qu’on dit, fous bronnoncez mal on dit un pichon … foila. » « Heureusement que j’ai un pon caractère toute la chournée. Je chante dans la poutique : aussi mamzelle Scholastique la guisinière tu teuxieme qu’à tit-on une pelle foix en est chalouse qu’elle prétend que je gazouille comme un ogre de parparie ! Eh bien quoiqu’on tise qu’elle chante comme un anche, che le grois bas, parce que ch’ai jamais pu obtenir un pont de chant d’elle, malgré qu’elle ait un choli chant délié ! Et je m’y gonnais parce que .......
III
Un coup d’œil tu matin aux soir je fais ce que chacun - té - sire.
Je fais je fiens tans mon comptoir ayant touchours le mot prour rire de mes pétisses. Si l’on rit rit c’est que je ne suis pas très prave, car je ne manque pas d’esprit j’en ai des tonneaux plein ma cafe ! Refrain
Parlé
C’est frai j’aime pas y tescentre tans mon cafe. D’abord il y a tes souris et tes bètits rats.et puis tes crands tonneaux pleins de ponnes marchantisse de toute sorte … il y a la mélasse, tu caramel, tu cassonate, tu moutarde et puis encore d’autres … J'en ai manch malgre moi. L'autre jour....j’étais tescentue chercher du moutarde pour remplir un pocal et je cueillais cet ingrétient dans une grande parrique avec une cuillere a pots en pots, quand un gros rat fient me sauter sur le dos … j’ai une frayeur épouvantable je baisse la tête … je crie … je saute … je glisse et je fais une culpute tans le tonneau ! …Quelle filaine position ! Plus que je me dépattais plus j’enfoncais et plus j’enfonçais, plus j’afalais. Heureusement qu’en tompant j’avais crié les garçons finrent vite à mon secours. Il était temps … La moutarde me commençait à me montez aux nez ! mais ont eu choliment tu mal pour ma pour m’arracher de la tetan … J’étais collée aux fond ! si vous aviez fus tant quelle toilette j’étais en sortant ? Il fallut me mettre sous le ropinet de la fontaine et me frictionner avec un palais de pouleau mais comme ça suffisait pas encore on fut opliché d’aller chercher la pompe à fapeur pour me déparpouiller. J’étais joliment vexée allez car mon boutique était pleine et je vous assure que j’aurais apantonné la gommerce si che l’avais pas tant aimé car … Refrain fin